Privacy : quelles approches pour pérenniser le pilotage de sa performance digitale ?

Privacy : quelles approches pour pérenniser le pilotage de sa performance digitale ?

Au vu des multiples changements majeurs en termes de protection des données que nous avons pu observer dans notre précédent article, plusieurs interrogations se posent : 

Comment mieux mesurer la performance des parcours et des conversions avec une déperdition de données ? Quels outils seraient pertinents dans un contexte de non-exhaustivité des données ?

 

Aujourd’hui, un des enjeux principaux pour les acteurs de la data est de réconcilier la compréhension des parcours utilisateurs avec la prise en compte des choix de consentement. Plusieurs solutions semblent appropriées pour concilier mise en conformité et mesure des performances. 

 

La mise en place de la modélisation des données 

 

La modélisation des données va permettre de déduire les données manquantes dans les données observées. En effet, grâce au machine learning qui analyse les données observées ainsi que l’historique des comportements, l’outil a ainsi la possibilité de reconstituer les données manquantes pour se rapprocher au plus près de la donnée d’origine. Il va être possible de modéliser le comportement des utilisateurs qui refusent le suivi via le consentement en se basant sur le comportement de ceux qui l’acceptent.

 

Cela peut avoir pour objectif de prédire les parcours des utilisateurs qui n’ont pas consenti et de leur attribuer des conversions. Les applications de ce processus sont alors multiples, allant de la reconstruction de données jusqu’à la prédiction de trafic, de leads ou encore de conversions. 

 

Google avec la fonctionnalité “Consent Mode” ou Facebook avec “Enhanced Conversions” se sont lancés dans la course pour une mise en application du Machine Learning généralisé dans leurs analyses statistiques.

 

Tâcher de modéliser soi-meme les données manquantes représente d’importants obstacles : forte difficulté d’implémentation, inexpérience et jeunesse des outils de Machine Learning, nécessité d’une maintenance régulière et de données en entrée de grande qualité, etc.

De ce point de vue, recourir à une solution du marché comme Google Consent Mode est préférable, il faut toutefois rappeler qu’elle n’est pas approuvée par la CNIL à date puisqu’elle nécessite de recueillir le consentement de l’utilisateur (voir notre article dédié au Consent Mode).

 

 

Le déploiement d’un tracking server side 


Le tracking server side permet le déclenchement des balises depuis un serveur distant et non directement depuis le navigateur. Le serveur joue le rôle de proxy entre la collecte des données et l’envoi de ces dernières pour offrir un contrôle total sur la transmission des informations aux partenaires. 

 

Aujourd’hui cette option est notamment disponible avec Google Tag Manager (GTM), qui propose d’envoyer le suivi standard vers un conteneur hébergé sur un environnement Cloud (de type Google Cloud Platform, Amazon Web Server ou encore Microsoft Azure par exemple). Ainsi, un conteneur placé du côté serveur pourrait permettre de réconcilier le choix des utilisateurs sur le suivi et les besoins de pilotage sans passer par le tracking des KPIs et les données clients.

 

Cependant, pour toute collecte d’information, qu’elle soit client-side ou server-side, le RGPD impose le consentement de l’utilisateur ! Cette solution (server-side) rencontre plusieurs autres contraintes notamment en termes de coût, qui peut être important. Aussi, elle n’est aujourd’hui pas compatible avec toutes les solutions data marketing. En effet, toutes les solutions (analytiques, publicitaires, etc.) ne sont pas compatibles avec l’envoi de données de serveur à serveur. Il faut donc étudier la faisabilité de chacune avant d’envisager une migration.

Déploiement d’un outil analytics exempté de consentement

 

L’exemption de consentement est encadrée par différents régulateurs européens de la protection des données.
Elle est conditionnée à plusieurs critères comme la limitation de finalité à la mesure d’audience ou encore la limitation des durées de vie des traceurs et de la conservation des données. 

 

Plusieurs outils tels que Matomo Analytics, Piano Analytics, Piwik PRO ou encore Contentsquare proposent une configuration de leur outil permettant de bénéficier de cette exemption de consentement par la CNIL. 

 

Il convient cependant de noter que l’exemption CNIL ne permet de collecter que très peu de données (sessions, pages vues). Les informations clés comme les données de campagne ne peuvent ainsi pas être remontées. Pour collecter davantage de données, le consentement de l’utilisateur devient nécessaire. De plus, les outils peuvent voir leur exemption révoquée par la CNIL ou par de futures mesures mais également dans d’autres pays car tous les pays de l’Union Européenne n’y sont pas favorables. 

L’Union Européenne ne se prononcera pas sur une éventuelle exemption de consentement à l’échelle européenne avant le courant de l’année 2023.

La  mise en place d’un Cookie wall 

 

Une des solutions peut être le recours à un “cookie wall” ou “mur de traceurs” qui va conditionner l’accès direct au contenu aux seuls utilisateurs qui consentent à la collecte de données et proposer une alternative aux autres utilisateurs : payer un abonnement, limiter l’accès aux fonctionnalités du site, créer un compte, etc.

 

De nombreux sites médias se sont saisis de cette approche en proposant de payer un abonnement mensuel ou un achat unique dans le cas d’un refus de tracking pour consulter l’article souhaité. Cette solution vient compenser la perte de revenus publicitaires (en raison de l’absence de traceurs). 

 

En mai 2022, la CNIL est venue encadrer cette pratique en précisant que le tarif devait être jugé raisonnable en cas de contrepartie monétaire et que l’alternative proposée devait être réelle et satisfaisante en cas de refus des traceurs. Il est également nécessaire de veiller à la facilité d’accès pour l’utilisateur à cette alternative et poursuivre des objectifs déterminés et transparents pour l’internaute en cas de création d’un compte.

 

Par cette solution, il va donc être possible d’améliorer l’exhaustivité des données par un meilleur taux de consentement mais aussi par une vision fiable du trafic réel. Cependant, cette solution peut difficilement s’appliquer à l’ensemble des sites car elle pourrait endommager l’expérience utilisateur notamment pour des sites e-commerce. De plus, cela peut également conduire à une réduction du trafic sur le site. 

 

La mise en place de Walled Garden

 

La mise en place de Walled Garden rend obligatoire l’authentification des utilisateurs pour naviguer sur le site web ou l’application mobile. C’est par exemple le cas pour des sites de ventes privées comme Showroomprivé, Voyage privé mais aussi les réseaux sociaux comme LinkedIn, Facebook ou Twitter. 

 

La mise en place de cette solution permet une meilleure compréhension des parcours cross-devices et cross-platforms de chaque utilisateur grâce à leur identification. Des scénarios de ciblage complexes peuvent alors être mis en place en tenant compte du parcours de l’utilisateur dans son ensemble. Cependant, le consentement reste obligatoire lors de la première connexion et l’utilisateur doit pouvoir retirer son consentement à tout moment. De plus, si ces walled gardens peuvent facilement s’appliquer à certaines typologies de sites, cela est difficilement envisageable pour des sites e-commerce au risque de nuire à l’expérience client globale.

 

Conclusion 

Le respect de la vie privée et la notion de consentement sont aujourd’hui essentiels mais vont cependant impacter la qualité et la quantité des données collectées. Des solutions existent pour concilier collecte et conformité RGPD afin d’assurer une continuité dans le pilotage de la performance des actions et l’analyse des données. 

 

Il convient alors de mettre en place différentes stratégies pour optimiser l’utilisation de ces outils et fonctionnalités  en fonction des contraintes de chaque site / application. 

 

Certes, il n’existe à ce jour pas de solution unique pour compenser les conséquences des contraintes réglementaires, sociétales et technologiques. Cependant la combinaison de ces différentes solutions peuvent contribuer à une stratégie de tracking plus résiliente et à l’amélioration de l’exhaustivité des données.

 

Infographie Elevate & Aviv

 

Photo de fauxels

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