Le tracking server-side : une solution suffisante pour piloter les campagnes média ?

Actualités
Le tracking server-side : une solution suffisante pour piloter les campagnes média ?

Aujourd’hui, la majorité des données personnelles sont collectées via un tracking côté client, aussi appelé tracking client-side. Avec ce modèle, les balises (tags), via des requêtes, créent et déposent des cookies first (dans le cas des solutions analytics comme Google Analytics) et third party (dans les cas des régies publicitaires comme Facebook Ads, TikTok Ads etc.) sur le navigateur (client) pour collecter la donnée et l’envoyer directement au serveur des plateformes marketing.

 

 

Schéma d'un site instrumenté pour utiliser un conteneur Web Google Tag Manager.

Source : https://developers.google.com/tag-platform/tag-manager/server-side/intro 

 

 

Face aux nouveaux cadres règlementaires (Eprivacy / RGPD), aux évolutions technologiques (ATT, Google Topics, ….), la protection des données personnelles et le besoin de transparence sont devenus des enjeux majeurs pour les consommateurs comme pour les annonceurs. Pour aider les utilisateurs à mieux protéger leurs données personnelles, de nombreux acteurs, solutions et protocoles font leur apparition (bloqueurs de publicités, RGPD, ETP Firefox, ITP Safari, etc.), ce qui fragilise le tracking client-side.

 

Depuis sa mise en vigueur en 2018, on constate un durcissement des contrôles du respect du RGPD. En 2021, les autorités de protection des données personnelles européennes ont reçu 130 000 notifications pour violation de données personnelles et ont imposé près de 1,1 milliard d’euros d’amendes*. Rien qu’en France on comptabilise 135 mises en demeure par la CNIL, 18 sanctions et plus 214 millions d’euros d’amende.

 

 

Mise en demeure de la CNIL

Evolution du nombre de mise en demeure par la CNIL

Source : https://www.cnil.fr/fr/bilan-sanctions-mises-en-demeure- 2021#:~:text=%C3%80%20l’occasion%20de%20la,de%20214%20millions%20d’euros

 

 

Un contexte réglementaire, technologique et sociétal qui contraint le tracking client-side et impact le pilotage média

 

C’est dans ce contexte que Safari a lancé sa fonctionnalité Intelligent Tracking Prevention (ITP) en 2017 pour limiter le suivi des utilisateurs via les cookies tiers. Depuis sa mise en place, la fonctionnalité a connu plusieurs évolutions. L’ITP permet entre autres de bloquer complètement les cookies-tiers et de limiter les cookies-first côté client dits “client-side” à 7 jours.

De son côté, en 2019, Mozilla Firefox lance sa fonctionnalité Enhance Tracking Protection (ETP) pour bloquer par défaut les cookies tiers. En 2021, Firefox renforce ETP avec Total Cookie Protection, des boîtes à cookies distinctes pour chaque site web visité, de sorte qu’ils ne soient pas autorisés à partager les données collectées avec d’autres sites.

 

Les récentes annonces de Google, souhaitant mettre fin à l’utilisation des cookies tiers sur son navigateur d’ici 2024 ainsi que la mise en place de l’App Tracking Transparency (qui permet aux utilisateurs de refuser le tracking inter-application), lors du lancement d’iOS 14.5 par Apple, viennent impacter le secteur de la publicité en ligne.

 

Pour les annonceurs, la disparition progressive des cookies tiers et la mise en place de mesure telle que l’App Tracking Transparency signifient un ciblage moins fin, une réduction de la taille des audiences de retargeting, des résultats de campagnes incomplets et une difficulté accrue pour optimiser les campagnes.

 

Afin de préserver la performance de leurs campagnes et continuer à les piloter en s’appuyant sur des décisions data-driven, les annonceurs sont dans l’obligation de s’adapter et d’utiliser des solutions alternatives pour collecter la donnée sans passer par les cookies tiers.

 

 

Le server-side au service des campagnes médias pour remplacer le tracking client-side

 

Outre les problématiques liées à la protection des données personnelles, le tracking côté client possède d’autres inconvénients : fiabilité de la donnée face aux bloqueurs de publicités, non adapté pour les applications mobiles ou autres appareils connectés, augmentation du temps de chargement des pages, etc. Toutes ces limites ont poussé certains médias tels que Facebook ou Tiktok à proposer à leurs annonceurs de passer par un tracking côté serveur ou server-side (API de Conversions), ne nécessitant pas l’usage de cookies tiers. Les balises, via des requêtes transmettent la donnée depuis le serveur web directement jusqu’à un serveur de destination (solution analytics, système CRM, outils de personnalisation, etc.).

 

 

Exemple de configuration d'ajout de balises utilisant un conteneur de serveur.

Source : https://developers.google.com/tag-platform/tag-manager/server-side/intro 

 

 

En plus de pallier la perte de données, l’utilisation d’un tracker server-side ou d’un API de Conversions permet aux annonceurs de suivre des évènements qu’il n’était pas possible de suivre via le tracking client-side (pixel). Autrement dit, avec cette solution, les annonceurs sont en mesure de suivre des événements qui ne se produisent pas et/ou ne sont pas directement enregistrés sur le site (application, outil de paiement tiers, hub d’assistance en ligne, évènements hors ligne, etc.). 

 

L’API conversions de Facebook permet, par exemple, d’y intégrer un système CRM (Facebook Leads). Les données qui y sont enregistrées permettent alors d’enrichir l’algorithme pour optimiser le ciblage des audiences, réduire le coût des publicités et améliorer l’attribution. Cela permet également de créer des publicités formulaires incitant les clients potentiels à s’inscrire afin de recevoir des informations sur l’offre. Les annonceurs enrichissent ainsi leur base de données et obtiennent des informations précises à exploiter.

 

Si le tracking server-side représente une solution alternative au tracking client-side, celui-ci n’est pas parfait. En effet, il ne permet pas de collecter la donnée des visiteurs du site qui ne sont pas connectés ou qui ne remplissent pas de formulaire. La donnée concernant les personnes ayant interagi avec les publicités, les informations démographiques, est donc limitée.

 

 

 

De nouveaux modèles au sein d’un écosystème interconnecté

 

Si l’on souhaite combler ce manque de données, on pourra alors se tourner vers d’autres solutions cookieless. Google a récemment lancé le projet Privacy Sandbox, celui-ci se compose d’un ensemble de solutions pour améliorer la protection des données utilisateurs.

 

Dans la Privacy Sandbox on retrouve :

  • Topics : un modèle de ciblage par cohorte se basant sur l’historique du navigateur,
  • la fin des cookies tiers en 2024 sur le navigateur Chrome,
  • Ads Data Hub (data clean room) : écosystème clos où l’annonceur peut réconcilier ses données 1st party avec des données éditeurs à des fins de reporting ou d’activation,etc.. 

 

Le ciblage contextuel est également une solution cookieless envisageable. Grâce à celui-ci, la publicité est désormais ciblée vers une liste de sujets et plus une liste d’individus. Cette méthode de ciblage est tirée du Nature Langage Processing (NLP). Ce procédé se base sur des algorithmes travaillant en réseaux de neurones pour analyser des textes et des contenus digitaux en tout genre afin d’améliorer le ciblage et la compréhension des lecteurs/consommateurs. Beaucoup d’acteurs proposent désormais leurs propres solutions (Teads, Quantcast, Qwery…) en concurrence directe avec les Demand Side Platform traditionnelles (DV360 par exemple).

 

Le ciblage contextuel se base sur les thématiques de sites, sur les url des pages ainsi que sur les mots-clés et l’interrelation des mots entre eux pour définir des segments de ciblage. Avec cette solution, il n’est pas nécessaire de recourir aux données personnelles pour réaliser un ciblage pertinent. C’est une alternative idéale pour les campagnes de prospection et d’acquisition mais malheureusement cela n’est pas possible pour les campagnes de retargeting ou de fidélisation. La contextualisation sémantique est un sujet envisagé par certains acteurs pour concurrencer l’identifiant unique et les données first-party ainsi que pour aider les éditeurs à identifier de nouvelles solutions de monétisation d’audience.

 

Les solutions cookieless au coeur des campagnes médias

 

Après un essor de l’utilisation des données tierces et des données personnelles, les acteurs du digital, les consommateurs ainsi que les régulateurs commencent à réagir. De ce fait, des alternatives émergent : un tracking repensé côté server afin de se réapproprier la donnée, un ciblage sémantique aidé par le machine learning permettant de toucher des cohortes ou encore un identifiant unique sur la base d’initiatives comme France Connect peuvent être des solutions. Autant de réponses qui verront le jour dans les années à venir.

 

Le cookieless est désormais un sujet qui fait partie de la vie digitale des utilisateurs. Il devient même un élément marketing  (Apple fait de la promotion sur le fait de protéger la sécurité des données des utilisateurs). Ceux-ci sont de plus en plus sensibilisés et leur perception de l’utilisation quotidienne d’Internet s’en retrouve modifiée. Se conformer aux nouvelles règles de vie privée en ligne afin de gagner la confiance de sa clientèle représente un enjeu de plus en plus important pour les marques. Malgré cette évolution des modèles et du tracking, il sera toujours possible de tracker les campagnes publicitaires ainsi que l’activité des sites. In fine, grâce à l’apparition de nouvelles métriques mais aussi de nouveaux schémas d’activation média, l’économie devrait perdurer et continuer à se renouveler et pourquoi pas se réinventer !

 

Sources : * https://www.lemondedudroit.fr/publications/248-etudes-et-documents/79519-infractions-reglement-general-europeen-sur-la-protection-des-donnees-rgpd-1-1-milliard-d-euros-d-amende-infligees.html 

 

 

 

Partager l'article: